Législatives 2024 : enfin le retour de la politique du logement ?
Alors que la majorité présidentielle a fait du logement un sujet secondaire, notre Henry Buzy-Cazaux, président fondateur de l'institut du Management des Services Immobiliers, veut croire qu'il retrouvera enfin sa vraie place dans le débat en France à l'occasion des élections législatives.
La campagne législative qui s'ouvre aura eu une durée historiquement courte. Le président de la République fait le pari que les Français se ressaisiront et exprimeront un votemodéré s'agissant du destin de leur pays, après avoir manifesté leur rejet de son parti pour les élections européennes finalement indifférentes pour eux. On saura au soir du premier tour, le 30 juin; si sa lecture du srutin communautaire de dimanche dernier est la bonne. En tout cas, il aura réussi à accélérer l'histoire politique du pays et la nouvelle physionomie des pôles de sensibilité de l'opinion. On voit se dessiner trois camps, celui de l'extrême droite enflée d'une partie de la droite traditionnelle, celui de la gauche augmentée de l'extrême gauche et le parti naguère au pouvoir, qu'on pourrait qualifier de centriste large.
Il faut être honnête : Renaissance, qui gouvernait avec le centre et la droite républicaine, a fait du logement un sujet mineur, avec même des intentions punitives. Le pire est que les autres partis n'ont pas fait mieux, et qu'on serait bien en peine d'identifier un corps de doctrine pour chacun d'eux dans l'action législative, ou seulement dans les discours depuis septs ans. Certes, les députés et les sénateurs ont réagi aux projets de loi et les ont amendés selon des convictions distinctes les unes des autres et relativement identitaires. Ils ont aussi déposé des propositions de loi et leurs initiatives ont distingué entre les plus libéraux et les plus sociaux, mais de là à dire que les epnsées sur le logement se fussent dessinés, il y a loin ! En définitve, ce que l'on a reproché au parti présidentiel et aux exécutifs successifs a contaminé les autres partis, un peu comme on joue forcément mal au tennis avec un mauvais joueur. Depuis 7 ans, c'est la pensée sur le logement et les politiques publiques souhaitables qui s'est appauvrie.
Précisément, les problèmes se sont accentués à force de n'être pas traités, et le logement préoccupe voire désespère une majorité de Français. Au sein des pôles de sensibilité alternatifs à la précédente majorité, on le ressent et on le sait. Les programmes qui s'écrivent ou se précisent ne passeront pas le logement sous silence. Difficile de dire à ce stade s'ils proposent seulement des mesures de court terme ou s'ils projetteront des réformes de fond. Quant au rassemblement de la macronie et des partis amis, on voit mal comment il ferait l'impasse du logement après le mea culpa du Président devant les Français lors de son allocution télévisée devant les Français. On peut ainsi s'attendre à des idées viriles et tranchées, là où on n'a eu le droit qu'à des balbutiements lors des dernières consultations électorales.
La suppression des droit de mutation, "une mesure choc plutôt qu'un plan à part entière"
Ce qu'on redoutait en revanche affecte déjà le camp présedentiel : Gabriel Attal, encore Premier ministre, vient de proposer une mesure choc, plutôt qu'un plan à part entière, et conçue dans la hâte elle provoque beaucoup de réactions expertes réservés sinon hostiles. Il s'agit d'éxonérer de droits de mutation à titre onéreux, improprement appelés frais de notaires, les primo-accédants jusqu'à un achat de 250 000€. Les observateurs craignent à juste titre que les acquéreurs dans l'existant, là où ces droits atteignent 8.5% du prix du logement, pâtissent d'une augmentation à due concurrence, au bénéfice des vendeurs. En clair, que l'effort public soit récupéré par le cédant et que l'aide soit détrounée.
Lorsqu'on voit combien la baisse des prix est fragile, avec des indices de remontée dans certaines villes, ces peurs ne sont pas infondées. Sans compter que l'Etat ferait un cadeau avec l'argent des départements, destinataires de l'essentiel des DMTO, qu'il compenserait avec de la TVA : les collectivités en ont assez d'être ainsi assujetties et de perdre leur autonomies fiscale. A dégrader encore le lien entre Etat et élus locaux, on va faire imploser le pays. Dernier défaut de la mesure : elle est exposée à l'anticonstitutionnalité, en créant une inégalité devant l'impôt. Pourquoi les accédants et les investisseurs seraient-ils exclus de la suppression des droits de mutation à titre onéreux ? Le vrai sujet des acquéreurs reste l'accès au crédit et la solvabilisation par l'emprunt : élargir le PTZ, rendre aux banques leur pouvoir de dire oui, voilà des mesures fortes. Il peut être opportun également de permettre la déductibilité des intérêts d'emprunt.
Enfin, la mesure Attal, pour marketée qu'elle soit, est bien faible pour redonner de l'oxygène au secteur d'activité et à la fillière professionnelle. Elle est plus atteinte qu'elle n'ose le dire elle-même, par pudeur ou avec l'idée naive que les mauvaises nouvelles appellent les mauvaises nouvelles et qu'il ne faut pas casser le moral de l'opinion. Comme si l'opinion avait le moral. Il faut saluer le courage lucide de professions au coeur du soutien, de l'accompagnemet et du sauvetage des entreprises, les administrateurs et les mandataires judiciaires, contitués en ordre national. Cette année, à la faveur de leur 24e Congrès, rituellement à la Colle-sur-Loup près de Nice, ils ont voulu faire un focus sur les secteurs d'activité les plus fragilisés, le logement, l'agriculture ou encore le textile. Dans la filière, de l'amont, le bâtiment, à l'val, la négociation et jusqu'au notariat, les dépôts de bilan se comptent par dizaines de milliers, au point que c'est l'appareil de production et de service qui est atteint, avec des pertes en compétences irréversibles avant plusieurs années. Précisémment, en avoir une pleine conscience est un impératif pour celles et ceux qui aspirent à être députés, et pour leurs partis.
Des ménages pour qui se loger ressortit au combat, des entreprises immobilières abîmées, des emplois détruits en masse, des rentrées fiscales effondrées : on attend le retour de la politique du logement, pas de gadgets de circonstance, avec des choix assumés et une authentique ambition pour la France.